Diffusions passées:

Le rôle de la moto au cinéma

Ulrich Seidl et les méchants garçons, diffusion du dimanche 17 juin 2018 à 05h05

La démarche du cinéaste autrichien Ulrich Seidl consiste à introduire en permanence de la fiction dans le documentaire, et vice versa. Son documentaire «Sous-sols», présenté hors compétition à la Mostra de Venise en 2014, explore les caves de la petite bourgeoisie autrichienne, faisant surgir des éléments de l'inconscient individuel et collectif. Des images tirées des répétitions de sa pièce «Böse Buben/Fiese Männer», créée à Vienne en 2012, aident à comprendre son oeuvre. Enfin, des séquences d'entretiens avec Ulrich Seidl et des extraits de ses films permettent de mieux appréhender sa démarche et sa personnalité, pour le moins complexe. Critique : Si un cinéaste suscite une véritable curio­sité sur sa méthode et ses tournages, c'est bien Ulrich Seidl, qui brise les tabous avec un calme olympien. Ce documentaire y répond, en partie seulement. Face à Sous-sols, exploration hallucinante des caves autrichiennes, on avait par ex­emple très envie de savoir comment le ciné­aste avait déniché tous les énergumènes plus ou moins allumés qui ont posé devant lui. Seidl explique qu'il a souvent suffi de sonner chez les gens. Difficile de se contenter de ça... Constantin Wulff est plus intéressant quand il montre le réalisateur en action, son perfectionnisme, sa direction d'acteurs, professionnels ou non, « modèles » ou non. « Mon style consiste surtout à com­poser des tableaux », éclaire-t-il un moment. Emaillé de divers extraits très perturbants (dont quelques scènes SM) de ses films et d'une pièce créée à Vienne, en 2012, Méchants Garçons/hommes hideux, le documentaire a le mérite de souligner l'empathie dont Seidl témoigne à l'égard de ceux qu'ils filment, renvoyant le jugement outré des « bourgeois » à un mépris de classe. Le réalisateur observe en effet la nature humaine et, à travers elle, des désirs, des frustrations, des servitudes volontaires, une quête du bonheur propre à chacun d'entre nous. « La douleur et le plaisir, la violence et le sexe sont des éléments interdépendants », résume encore ce cinéaste unique en son genre, qui croise l'anthropologie et le collage. -- Jacques Morice