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Taxi Téhéran, diffusion du mardi 27 février 2018 à 01h25

Interdit de tourner, de sortir de chez lui : s'improvisant chauffeur de taxi dans Téhéran, avec une petite caméra à bord, Jafar Panahi brave la loi des mollahs et réussit un beau film à la fois sociologique et introspectif. Critique : Le cinéaste qui a remporté l'Ours d'or du festival de Berlin n'était pas là pour venir chercher son prix. Ce n'était pourtant pas Terrence Malick, l'homme qui ne se montre jamais - son décevant Knight of cups est reparti bredouille. Non, le vainqueur avait une bonne excuse : l'Iranien Jafar Panahi a été condamné fin 2010 à six ans de prison et vingt ans d'interdiction de faire des films pour « propagande contre le régime ». Relâché sous caution, il vit désormais en liberté surveillée à Téhéran, d'où il envoie des oeuvres tournées clandestinement. Moins austère que Ceci n'est pas un film, en 2011, avec pour unique décor son appartement, Taxi Téhéran justifie amplement sa récompense et le discours enthousiaste du président du jury, l'Américain Darren Aronofsky, s'émerveillant que Panahi ne se soit pas laissé « envahir par la colère et la frustration ». Car Taxi Téhéran, qui sortira en France le 15 avril, a longtemps des allures de comédie, avant que la dernière séquence ne laisse place à l'émotion. On y voit Jafar Panahi, au volant de sa voiture, trimbaler des passagers dans Téhéran. Une plongée sociologique dans l'Iran d'aujourd'hui ? Non, parce qu'au terme de la première scène, qui feint le réalisme, on comprend qu'il s'agit avant tout d'une réflexion construite sur l'image et ses mensonges. Point d'orgue de la démonstration, le passage par le taxi de la propre nièce du cinéaste, à qui son école a confié la réalisation d'un court métrage et qui se débat, elle aussi, avec la censure... Porté par la figure bonhomme du cinéaste, effectivement ni en colère ni frustré, le film a dominé une sélection de bonne tenue. En ces temps de menace sur la liberté d'expression, il fait un magnifique lauréat. — Aurélien Ferenczi
