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Seul sur Mars, diffusion du dimanche 18 mars 2018 à 21h00

Décors grandioses et humour noir : l’auteur d’Alien signe une odyssée de l’espace où un Robinson s’acharne à survivre en attendant les secours. Critique : La semaine où la Nasa annonce avoir trouvé de l'eau à l'état liquide sur Mars, Ridley Scott sort son nouveau film aux Etats-Unis, dans lequel un astronaute-botaniste, abandonné par son équipage, se construit un potager sur la planète rouge, en attendant un hypothétique sauvetage. La coïncidence laisse songeur sur la puissance du marketing hollywoodien. La Nasa n'a plus les moyens d'envoyer autre chose qu'un minuscule robot sur Mars ? Qu'à cela ne tienne, Hollywood déroule sa collection de space movies pour jouer le rôle euphorisant et patriotique que l'agence spatiale endossait dans les années 1960, du temps des missions Apollo. Peu importe que Seul sur Mars pioche allègrement dans le scénario de Gravity et dans la distribution d'Interstellar (Matt Damon et Jessica Chastain). Seul compte le voyage dans l'espace, le « trip » visuel. Et il faut reconnaître qu'en matière de spectacle rien ne manque au cahier des charges : ni les décors grandioses (du désert jordanien), ni la 3D (très réussie, pour une fois), ni l'humour noir et l'autodérision d'un Matt Damon plus charmeur que jamais. A 77 ans, sir Ridley Scott est bien le patron du film de science-fiction. Ironie du sort : celui qui a bâti sa carrière en faisant de l'espace l'endroit le plus anxiogène de l'univers avec Alien — qui reste encore, après 2001 : l'Odyssée de l'espace, la référence absolue du genre — revient à ses amours de jeunesse avec un feel good movie où un néo-Robinson Crusoé fait pousser des patates sur le sol martien, fertilisé avec ses propres excréments lyophilisés. La fin heureuse ne fait évidemment aucun doute, en dépit des légitimes difficultés rencontrées par le « Martien » pour survivre pendant les nombreuses années nécessaires à ses camarades pour faire demi-tour. Les Etats-Unis n'ont jamais abandonné un de leurs soldats, c'est bien connu. Entre deux séances de jardinage cosmique, on assiste aux réunions de crise dans les bureaux de la Nasa avec leur palette de personnages aussi invraisemblables que savoureux : le geek qui résout l'équation magique sous caféine, le chef bricoleur chargé d'imaginer le retour de la navette avec des maquettes. L'absence notable du traditionnel traître ou de l'agent double est le signe d'un optimisme assumé. Comme l'est un certain pragmatisme géopolitique qui fait de la Chine, avec ses ingénieurs aérospatiaux, l'alliée indispensable de la Nasa. Eloge naïf de la collaboration internationale, seule capable de couronner de succès une mission impossible sur le papier. Ou habile tentative de Hollywood pour séduire le gigantesque marché chinois, nouvel eldorado des blockbusters ? — Jérémie Couston