Diffusions passées:
Faiseurs de tubes, Une industrie en mutation, diffusion du dimanche 16 septembre 2018 à 05h05
Jusqu'à l'émergence d'Internet, les titres promis aux sommets des charts devaient passer en boucle à la radio, avant que les amateurs ne se ruent chez le disquaire ou le grand magasin le plus proche. Avec, à la clé, des disques d'or. Aujourd'hui, avec la multiplication des supports de diffusion et les réseaux sociaux – YouTube, Shazam, Spotify, SoundCloud, Facebook –, labels et artistes doivent s'adapter. Si, à la fin des années 60, six à sept cents albums étaient publiés par an, ce chiffre est désormais atteint en deux jours ! Certains musiciens et groupes tiennent encore à matérialiser leurs titres sous forme d'albums, mais d'autres ne jurent plus que par la toile. Critique : « Pendant longtemps, un tube était une chanson qui passait à la radio et qu'un consommateur avait envie d'acheter. » L'avènement du numérique a dynamité le modèle existant. Internet a mis les plateformes de streaming et de téléchargement au centre du dispositif. YouTube n'a pas remplacé les tubes mais s'est substitué à la radio. Tandis que les maisons de disques se restructurent, les artistes ont gagné en indépendance. Leur nombre a explosé, mais leurs revenus ont fondu. Désormais, les majors n'investissent plus dans des carrières mais, avant tout, dans des stratégies marketing. Cette révolution numérique est bien illustrée par ce documentaire qui explore toutes les facettes de la planète musicale en donnant la parole aux labels, aux producteurs (Seymour Stein, qui a signé Madonna, The Cure, Depeche Mode...) et aux artistes : la jeune Néo-Zélandaise Lorde et son succès fulgurant, Royals (single sorti en 2013), comme le groupe américain de hip-hop The Roots, qui a patiemment construit une « communauté » musicale à Philadelphie dans les années 1990 et a fait carrière pour ainsi dire sans tube. Rappelant beaucoup de phénomènes déjà connus, le film insiste trop peu sur une tendance majeure : les artistes doivent désormais se passer de plus en plus de producteur et ne pas attendre d'être repérés pour développer leur projet artistique. Mais dans ce nouvel écosystème, une question fondamentale reste en suspens : peut-on réellement se donner les moyens de faire de la musique si l'on ne peut en vivre ? — Yohav Oremiatzki