Diffusions passées:

Detroit, diffusion du jeudi 18 octobre 2018 à 15h20

Été 1967. Une vague d’émeutes sans précédent, suscitée par la guerre du Vietnam et la ségrégation raciale, secoue les Etats-Unis. A Détroit, des coups de feu retentissent à proximité d’une base de la Garde nationale. Des policiers emmenés par le jeune Krauss débarquent à l'Algiers Motel, d'où seraient partis lesdits coups de feu. Découvrant des jeunes filles blanches en compagnie d'hommes noirs, ils se lancent alors dans un interrogatoire tout sauf réglementaire. A l'issue de ce contrôle sadique, trois hommes, non armés, sont tués et plusieurs autres blessés. Dismukes, un agent de sécurité, assiste à la scène. Il est arrêté par les autorités, qui refusent de croire à sa version des faits. Critique : | GENRE : HARCÈLEMENT. 1967. Deux ans auparavant, il y a eu les émeutes raciales de Watts, à Los Angeles. Et maintenant, Detroit. L’intelligence du film est de revenir sur cette page de l’histoire américaine en passant de la vue d’ensemble — un quartier qui bascule dans le chaos — à un fait isolé : la tragédie de l’Algiers Motel. Avec son fidèle scénariste, Mark Boal, elle en a reconstitué le déroulé fatidique. Occupation, chantage, sadisme, tout ce qui se joue ici en huis clos est un concentré de tension explosive. La réalisatrice explore les ressorts du racisme haineux, fondé sur la frustration, la jalousie. La réalisatrice montre des Noirs intégrés dans le camp des dominants, des Blancs respectueux des droits civiques. Elle parvient à dissocier victime ou bourreau. Tout en englobant une histoire collective — remontant à des décennies de ségrégation — dont Larry Reed, le chanteur du groupe The Dramatics, serait en quelque sorte le dépositaire. Plein d’espoir, mais frappé au sens propre et au sens figuré par la malédiction, il ne veut plus chanter pour les Blancs après le drame du motel. A travers lui résonne une part de ce qui fait la grandeur de la musique noire (gospel, soul, jazz), mais aussi beaucoup d’amertume, de dignité bafouée et de fierté autodestructrice.

Detroit, diffusion du mardi 25 septembre 2018 à 15h20

Detroit, diffusion du mardi 18 septembre 2018 à 09h25

Detroit, diffusion du samedi 15 septembre 2018 à 08h10

Detroit, diffusion du mardi 11 septembre 2018 à 21h05

Été 1967. Une vague d’émeutes sans précédent, suscitée par la guerre du Vietnam et la ségrégation raciale, secoue les Etats-Unis. A Détroit, des coups de feu retentissent à proximité d’une base de la Garde nationale. Des policiers emmenés par le jeune Krauss débarquent à l'Algiers Motel, d'où seraient partis lesdits coups de feu. Découvrant des jeunes filles blanches en compagnie d'hommes noirs, ils se lancent alors dans un interrogatoire tout sauf réglementaire. A l'issue de ce contrôle sadique, trois hommes, non armés, sont tués et plusieurs autres blessés. Dismukes, un agent de sécurité, assiste à la scène. Il est arrêté par les autorités, qui refusent de croire à sa version des faits. Critique : Cela commence en musique. Normal : on est à Detroit, berceau de la Motown, usine à tubes phénoménale, dont l’esprit imprègne le film. Une fête, organisée par des Noirs américains, bat son plein. Ambiance chaude et joyeuse, mais qui déplaît. Jugée illégale, la fête est interrompue par une descente de police. Tout le monde est embarqué, sans ménagement. Certains flics, mains baladeuses, en profitent. Dans la rue, des attroupements se forment, la colère commence à gronder. La police se sauve, le quartier explose, bascule dans le chaos. De manière vive, multiple, ample, en intégrant des documents d’archives, Kathryn Bigelow vient de filmer l’étincelle de trop qui met le feu aux poudres. On est en 1967. Deux ans auparavant, il y a eu les émeutes très violentes de Watts, à Los Angeles. La vague de révolte touche maintenant d’autres villes, dont Detroit. L’intelligence aiguisée de Kathryn Bigelow est de revenir sur cette page insurrectionnelle de l’histoire américaine en passant de la vue d’ensemble à un fait isolé, fortement chargé de sens et de symboles : la tragédie de l’Algiers Motel. Avec le soutien de son fidèle scénariste, Mark Boal, lequel a mené comme à son habitude une enquête très poussée en rencontrant des participants de chaque bord (policiers, victimes…), elle en a reconstitué le déroulé fatidique, quasiment en temps réel. En le transformant en parabole sur la violence psychologique et physique. A la suite de plusieurs détonations entendues, des policiers et des militaires interviennent dans le motel. Où logent plusieurs protagonistes, dont un chanteur de soul et un ami à lui, avec lesquels on a déjà fait connaissance. Ils passent du bon temps, en compagnie de deux filles blanches, lorsque les forces de l’ordre font irruption. Parmi les policiers, Krauss, profil du raciste pernicieux, est particulièrement remonté. C’est le meneur. Arme au poing, avec ses deux acolytes, il cantonne les clients dans le couloir, les contraint à rester les bras levés et les interroge de plus en plus brutalement, cherchant à leur extorquer des aveux. Manipulation, chantage, torture, tout ce qui se joue dans ce théâtre en huis clos est un concentré de tension explosive. Où la réalisatrice dépasse le simple constat de l’injustice pour explorer les ressorts du racisme, de la haine, du sadisme, mais aussi de la survie. Autour des deux demoiselles en minijupe, pimpantes, sexy, transpirent en effet frustration sexuelle, jalousie, sentiment de dépossession. A cela s’ajoute la position fâcheuse de ce vigile noir, présent sur le lieu. Un type consciencieux, mais complice du pire, de par sa non-intervention. Dans le motel ou à l’extérieur, la réalisatrice refuse les généralités hâtives, montre des Noirs intégrés dans le camp des dominants, des Blancs respectueux des droits civiques. Elle fait la distinction entre les forces d’intervention (polices municipale et fédérale, Garde nationale). De manière juste et responsable, à travers une mise en scène aussi brillante que terriblement efficace, elle parvient à dissocier chaque individu, victime ou bourreau. Tout en englobant une histoire collective, plus large, remontant à des décennies d’humiliation et de ségrégation. Un personnage en est en quelque sorte le dépositaire, c’est Larry Reed, le chanteur du groupe The Dramatics. Plein d’espoir, promis à la gloire, frappé au sens propre et au sens figuré par la malédiction, il ne veut plus chanter pour les Blancs après le drame du motel. A travers lui résonne une part de ce qui fait la grandeur de la musique noire (gospel, soul, jazz) mais aussi beaucoup d’amertume. De dignité bafouée, de fierté autodestructrice et de renoncement, il est aussi question. Au détour d’une de ces parenthèses poignantes dont Bigelow a le secret, on voit une médecin légiste, face à un père anéanti, qui parle avec douceur de ses enfants, des adolescents jouant les gros durs qui cherchent leur place. La virilité, on y revient toujours, d’une manière ou d’une autre, avec Bigelow. Et avec elle, à cette violence, légitime ou non, qui embrase autant qu’elle paralyse, qui élève et dévaste les hommes et la société.