Diffusions passées:

Des Apaches, diffusion du mercredi 11 avril 2018 à 00h45

Un jeune homme à Paris… Son père kabyle, qui l'avait rejeté, se rapproche de lui. Deuxième film d'un cinéaste ambitieux, à la lisière du fantastique. Critique : Dès son premier film, Adieu Gary, Nassim Amaouche créait, autour d'une usine désaffectée et d'un ado qui fantasmait sur Gary Cooper, un climat fantastique. Ici aussi, on est constamment dans l'inquiétude, à la lisière du rêve éveillé. Ces Kabyles, installés à Barbès, qui organisent des transactions immobilières selon leurs lois ancestrales semblent à la fois issus d'un documentaire et d'une fiction de Martin Scorsese. Avec trognes, cérémonial et personnages aux sourires forcés. Le plus inquiétant est ce louche « avocat de la famille » : André Dussollier l'interprète avec une jubilation visible. Samir (Nassim Amaouche) est le fils aîné, mais illégitime, d'un de ces patrons de clan. Il se balade comme le héros des Nuits blanches, de Dostoïevski : la vie ne vient pas à lui, c'est lui qui la tire, l'étire à sa guise, la modèle comme une pâte, selon ses angoisses et ses désirs. En suivant son périple, le cinéaste fait affleurer sur l'écran un univers mental, il éclaire l'inconscient. Le petit garçon que rejoint Samir sur le toit d'un immeuble, c'est peut-être lui, quelques années auparavant. Le gamin, que son père n'a pas reconnu lui non plus, attend, chaque nuit, le retour de sa mère qui travaille dur pour l'élever. C'est cette même jeune femme (Laetitia Casta) qui apportera, plus tard, à Samir une paix relative en l'amenant doucement vers la vraie vie. Comme dans Le Miroir, d'Andreï Tarkovski, la mère et l'épouse se confondent dans l'esprit du narrateur, puisqu'elles sont seules à lui vouer un amour infini... Dommage que l'on ait contraint Nassim Amaouche — ou qu'il se soit forcé lui-même — à imaginer un épilogue solaire, rassurant, qui dissipe toutes les ambiguïtés. Est-il donc impossible, aujourd'hui, pour un cinéaste de rester jusqu'au bout dans l'ambiguïté ? — Pierre Murat