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Blue Jasmine, diffusion du mardi 08 mai 2018 à 13h35

Avec une Cate Blanchett au sommet, Woody Allen réussit l'exploit de signer à la fois un mélo bouleversant et une comédie irrésistible. Critique : | Genre : une autre femme. Manifestement conçu sous le coup de l'affaire Madoff et de la ruine d'une multitude d'Américains depuis la fin des années 2000, Blue Jasmine traite d'un sujet très contemporain : le déclassement social. Woody Allen n'est donc pas toujours là où on l'attend et, en l'occurrence, l'actualité lui sied terriblement. La dégringolade a un visage, celui de cette Jasmine cafardeuse, « blue » en anglais. Elle vivait la grande vie à New York, épouse d'un homme d'affaires. Elle arrive à San Francisco seule, gavée d'anxiolytiques et criblée de dettes, ses bagages Vuitton et sa veste Chanel comme seuls vestiges de ses années fastes. Telle une nouvelle Blanche DuBois, elle squatte chez sa soeur en attendant de se refaire. C'est un personnage pathétique et spectaculaire, risible et bouleversant. Il n'y a qu'Allen pour tenir cet alliage instable pendant tout un film. Envers sa créature, le fabuliste se fera cruel comme il ne l'a jamais été avec aucune de ses héroïnes. C'est pourquoi la solidité, l'arrogance naturelles de Cate Blanchett, oscarisée pour ce rôle, sont si indispensables : avec une actrice plus vulnérable, ce serait un véritable crève-coeur... Bourgeoise cousue de fil blanc, petite grande dame de pacotille, obsédée par le regard des autres, Jasmine s'approche toujours plus près du précipice. Pourtant, une anecdote au passage laisse filtrer, enfin, un peu de compassion de la part du cinéaste, ainsi qu'un début d'espoir, une lueur : la déclassée s'attarde un moment sur le sens de son (faux) prénom. La fleur de jasmin bleue, assure-t-elle, est une variété qui s'épanouit seulement sur le tard, à la tombée du jour. C'est tout le mal qu'on lui souhaite. -- Louis Guichard
